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- Lutte ouvrière n°2986
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Dans le monde
États-Unis : les rois à abattre
Les manifestations de protestation du 18 octobre contre la politique de Trump ont rassemblé des millions de personnes dans des centaines de villes, grandes et moyennes, des États-Unis, derrière le slogan « No Kings » (pas de rois).
La première des raisons de manifester sa révolte est les raids contre les travailleurs immigrés qui sèment la peur parmi les habitants de quartiers entiers : peur d’être pourchassé en se rendant au travail, en amenant ses enfants à l’école ou en faisant ses courses, de voir la porte de son logement enfoncée durant la nuit, d’être emprisonné et expulsé. La police de l’immigration ICE, ses agents masqués et suréquipés, se comportant en force d’occupation et arrêtant à peu près n’importe qui parlant anglais avec un accent, étaient la cible de nombreux slogans.
L’indignation s’exprimait aussi contre l’intimidation dont sont victimes des salariés qui critiquent Trump et son entourage d’extrême droite. Dénoncés à leur patron ou directeur de service public, des centaines ont perdu leur emploi pour déloyauté envers le président. Une nouvelle loi, non écrite mais bien réelle, s’impose : on peut perdre son emploi et être traîné devant les tribunaux pour une peccadille pour peu qu’on critique ouvertement la Maison Blanche surtout dans les médias mais même dans son cercle d’amis, sur les réseaux sociaux. Par contre, ceux qui sont les alliés politiques de Trump sont systématiquement graciés s’ils ont été condamnés à de la prison.
Le slogan « No Kings », pas de rois, était évidemment une pointe dirigée contre l’autoritarisme croissant de Trump. C’était aussi une référence à la révolution américaine du 18e siècle, qui avait mis fin à l’autorité du roi d’Angleterre sur treize de ses colonies. Aujourd’hui, certains se dressent contre Trump en invoquant le respect de la Constitution rédigée à cette époque lointaine.
Ce thème politique ne peut que profiter au Parti démocrate, dont les organisateurs du mouvement « No Kings » sont proches, qui espère faire oublier le discrédit profond, en particulier auprès de l’électorat ouvrier, que les présidences Obama puis Biden ont engendré, en ouvrant par deux fois un boulevard à Trump. Les démocrates ne donnent qu’une perspective aux millions de manifestants : patienter jusqu’à pouvoir les réélire lors des prochaines élections à la tête des villes et des États, les ramener à la Maison Blanche et leur donner une majorité au Congrès.
Pour les nombreux travailleurs et jeunes révulsés par Trump, il vaut pourtant la peine de se demander pourquoi les rois actuels de l’économie, les milliardaires de la tech et ceux de l’automobile ou du pétrole, se sont enrichis tant sous les démocrates que sous les républicains, tant sous un Obama aux discours bienveillants que sous un Trump raciste, et pourquoi ils sont si triomphants aujourd’hui. L’autoritarisme croissant de la présidence Trump n’est au fond que le vrai visage de la dictature de la grande bourgeoisie sur la société. Et c’est bien à celle-là qu’il faudra s’attaquer.